Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/34

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aménagea de grandes salles où grains et fruits étaient emmagasinés, et où se faisait la distribution, surveillée par des employés spéciaux.

De même que Néhémie s’était occupé de repeupler Jérusalem, il s’occupa aussi des logements qui devaient abriter sa population. Pour ceux qui n’avaient pas le moyen de se bâtir des maisons, à en fit bâtir à ses frais, comme d’ailleurs, en général, il mettait sa fortune au service de tous les besoins.

Il avait ainsi créé, en quelque sorte, un nouvel État, qui devait vivre désormais d’après les principes de la Loi. Il administra Juda pendant douze ans en qualité de gouverneur (444-432). Il dut alors s’en retourner à la cour d’Artaxerxés, qui lui conservait toujours sa faveur. Il partit plein d’espérance dans la durée de l’œuvre qu’il avait accomplie, œuvre de sécurité matérielle et de relèvement moral.

Mais quoi ! toute œuvre humaine est sujette aux vicissitudes. Sitôt que Néhémie ne fut plus là, il s’établit une réaction, et ce fut, selon toute apparence, le grand prêtre Éliasib qui en fut l’instigateur. En effet, Néhémie, en le dépossédant de son autorité sur le sanctuaire et sur le peuple, l’avait relégué dans l’ombre et blessé dans sa dignité. Son premier, acte fut de se rapprocher des Samaritains, au mépris du décret de la Grande Assemblée. Pour cimenter son alliance avec eux, un membre de sa famille, nommé Manassé, épousa la fille de Sanballat, Nikaso[9]. L’exemple de la famille pontificale fut suivi par d’autres encore, que sans doute les rigoureuses prescriptions d’Ezra et de Néhémie avaient déjà secrètement irrités. Ce fut un changement complet de système. Tobie, cet autre ennemi de Néhémie, put, sans le moindre empêchement, revenir à Jérusalem, où une grande salle fut mise à sa disposition dans le parvis du temple.

Une perturbation profonde naquit de cette situation, où, par un brusque revirement, l’on permettait aujourd’hui ce qu’on avait si sévèrement, défendu hier. La masse du peuple était outrée contre le grand prêtre et ses partisans, et leur témoignait ouvertement son mépris. Les possesseurs de terres ne voulurent plus acquitter la dîme ni des redevances sacerdotales. Les innocents pâtirent de cette privation infligée aux indignes : les Lévites se