Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/45

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dont les Judéens du pays et plus encore ceux de Perse se servaient dans leur pratique journalière, fut en conséquence adoptée pour la transcription de la Thora et des autres livres saints qui pouvaient exister à cette époque ; pour la distinguer de l’ancienne, on la nomma l’écriture assyrienne (khetab aschouri), parce qu’elle avait reçu sa forme dans une province autrefois assyrienne. Mais les Samaritains conservèrent sa forme antique au texte du Pentateuque, et cela par esprit de contradiction, pour pouvoir accuser leurs adversaires d’avoir introduit une innovation et falsifié la Thora. Aujourd’hui encore leur Écriture sainte offre ces mêmes caractères archaïques, que leurs prêtres eux-mêmes, pour la plupart, sont incapables de lire.

Par suite de ces fréquentes lectures de la Loi et de cette facilité à en déchiffrer le texte, s’éveilla chez les Judéens une sorte d’ardeur et d’activité religieuse, qui imprima peu à peu à toute la race un caractère particulier. La Thora devint pour elle une possession spirituelle, un sanctuaire intérieur. Une autre institution encore prit naissance à cette époque ; je veux dire des écoles pour les adultes, écoles destinées à leur faire connaître, à leur faire aimer la doctrine et les lois religieuses. Les guides spirituels du peuple avaient énergiquement recommandé à leurs successeurs de former beaucoup de disciples, et sans aucun doute ils ont dû faire eux-mêmes ce qu’ils recommandaient d’une manière si pressante. Une de ces écoles supérieures (bêth waad) fut certainement instituée en premier lieu à Jérusalem. On donna aux maîtres le nom de docteurs de l’Écriture, scribes (sôpherim) ou de sages, aux élèves celui de disciples des sages (talmidé chachamim). Le rôle de ces sages ou docteurs était double : d’une part, interpréter les lois de la Thora ; de l’autre, en réaliser l’application dans la vie individuelle ou collective. Le grand Conseil et la maison d’école se donnaient la main et se complétaient mutuellement. Il en résulta une incitation puissante quoique invisible, qui a donné aux descendants des patriarches une empreinte si originale qu’elle agit à l’instar d’une aptitude native ; à savoir, la passion d’approfondir, d’interpréter, de tendre toutes les facultés d’un esprit subtil pour découvrir dans un mot ou dans un fait des aspects nouveaux.