Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/80

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mode grecque formaient un parti considérable, qui se recrutait surtout parmi les riches et les notables ; ils comptaient même dans leurs rangs un fils de grand prêtre, Jésua (qui se faisait appeler Jason), et d’autres Aaronides. Les fils encore vivants du receveur Joseph et ses petits-fils, qu’on nommait les Tobiades (descendants de Tobie), tous gens sans principes, étaient à leur tête. Comme la loi et les mœurs judaïques s’opposaient aux innovations, particulièrement à l’usage indécent de se déshabiller pour les joutes, les Hellénistes maudissaient en secret la vieille loi de leurs pères, et n’avaient plus d’autre pensée que de la supprimer pour pouvoir gréciser à leur aise le peuple judéen. La fusion, une fusion absolue avec les Grecs idolâtres, était le plus cher de leurs vœux. A quoi bon ces haies élevées avec tant de sollicitude autour du judaïsme par Ezra, Néhémie et le grand Conseil ? Les Hellénistes les renversaient toutes ; ils auraient voulu abattre le tronc lui-même.

Ainsi qu’il arrive souvent chez les peuples qui ont conservé quelque ressort, cet excès provoqua un excès contraire. Ceux qui assistaient avec douleur et colère aux tentatives des Hellénistes formèrent une association, décidée à s’attacher de toutes ses forces à la loi et aux mœurs antiques et à les défendre avec énergie. Ce fut la Société des pieux ou Hassidéens (chassidim), une dérivation des anciens Naziréens. Aux yeux de cette société, toute coutume religieuse était chose sainte et inviolable. Rarement antagonisme fut plus tranché que celui qui séparait ces deux partis. Ils en étaient venus à ne plus s’entendre absolument, et il ne semblait pas que ce fussent les enfants d’une même race, les membres d’un même peuple. Ce que les Hellénistes poursuivaient de leurs plus ardents désirs, les Hassidéens le repoussaient comme une infamie, comme un crime, comme une trahison sans exemple, et ils en flétrissaient les partisans du nom de violateurs de la Loi, de traîtres à l’Alliance. Ce que les seconds, au contraire, tenaient pour cher et sacré, les autres le raillaient comme une extravagance, l’exécraient comme un obstacle au bien-être et à la durée de la société judaïque. Parmi ces piétistes rigides, il faut compter sans doute deux docteurs de la loi qui vivaient à cette époque : José (Joseph), fils de Joézer, de la petite