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districts de la Babylonie juive ; il apprit ainsi dans quelle profonde ignorance vivaient les communautés éloignées du centre. Il arriva un jour dans un endroit où l’on ne connaissait même pas la défense de manger de la viande avec du lait. Pour remédier en partie aux inconvénients qui résultaient d’une telle situation, Rab défendit souvent ce qui était permis, et comme son autorité était très grande, les aggravations qu’il introduisit dans le judaïsme furent acceptées et acquirent force de loi. L’abandon dans lequel se trouvait la région de Sora lui inspira la pensée d’y fonder une école. Son entreprise réussit admirablement ; l’académie de Sora resta, presque sans interruption, pendant huit siècles, le siège de la science juive.

La nouvelle école, appelée du nom consacré de Sidra, fut ouverte (vers 219) par Abba Areka. Attirés par la réputation de ce docteur, douze cents disciples accoururent de tous les coins de la Babylonie et des pays parthes. L’école ne pouvait plus contenir tous les auditeurs, et Abba Areka fut obligé de l’agrandir par l’adjonction d’un jardin. Ses disciples lui témoignaient une profonde vénération, ils l’appelaient Rab, le maître, comme on avait nommé autrefois le patriarche Juda Rabbi ou Rabbenou ; ce titre de Rab est devenu son nom. Son école était désignée par le terme de Bé-Rab (maison du Rab) ; cette appellation s’appliqua plus tard à toute école. Son autorité religieuse dépassait la Babylonie. Le plus illustre docteur de la Judée, Johanan, lui écrivait : « À notre maître en Babylonie » ; il se fâchait contre ceux qui parlaient de son collègue avec dédain, et il avoua que Rab était le seul docteur auquel il se fût subordonné. Rab possédait des champs qu’il faisait cultiver et dont il consacrait les revenus à l’entretien de ses disciples pauvres. Du reste, il avait organisé son enseignement de telle sorte que ses auditeurs pouvaient se consacrer à l’étude de la Loi tout en pratiquant un métier pour s’assurer des moyens d’existence. Les élèves se réunissaient à Sora pendant deux mois de l’année (Ader et Ellul), au commencement de l’automne et au commencement du printemps. Durant ces deux mois, appelés mois de réunion (Yarhè Kalla), il y avait chaque jour, dès le matin, des conférences ; les auditeurs prenaient à peine le temps de déjeuner. Ces conférences publiques s’appelaient Kalla.