Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 3.djvu/93

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jour au Tannaïte : « Si tu es aussi savant que tu le prétends, dis-moi ce que je rêverai cette nuit. — Tu rêveras, lui répondit Josua, que les Perses (Parthes) te réduiront en esclavage et te forceront à garder de vils animaux avec un sceptre d’or. » La réponse dut produire une profonde impression sur le superstitieux César, qui redoutait vivement les Parthes et ne reculait devant aucun sacrifice pour vivre en paix avec eux.

Adrien était convaincu qu’il n’avait à craindre aucune hostilité de la part des Judéens, et il informa le sénat que la Judée avait manifesté, lors de son voyage dans ce pays, les dispositions les plus pacifiques. Le sénat décida de perpétuer le souvenir de cette heureuse communication, et il fit frapper, dans ce but, diverses médailles. Les unes représentaient l’empereur en toge, ayant devant lui la Judée à genoux, qu’il cherche à relever de cette humble posture : trois enfants (probablement la Judée, la Samarie et la Galilée) lui présentent des branches de palmier. Sur d’autres médailles, on voyait la Judée et l’empereur offrant ensemble des sacrifices. Ainsi Adrien espérait que dans un avenir très prochain toute distinction de race et de religion s’évanouirait, et que la fusion serait complète entre les Judéens et les Romains. Pour aider à cette fusion, il conçut un projet d’une extravagance inouïe. Il voulut que la ville de Jérusalem, qu’il s’agissait alors de rebâtir, fut transformée en cité païenne. Pendant son séjour en Égypte, où il commit toutes sortes de folies, la profanation de la ville sainte fut définitivement résolue. Naturellement, les Judéens n’étaient pas disposés à accepter avec résignation un acte qui devait faire disparaître le judaïsme comme race et comme religion. Il se produisit dans les esprits une dangereuse fermentation. Josua reprit, selon toute probabilité, sa tâche de conciliateur ; il essaya de ramener l’empereur à un sentiment plus juste de la situation et à apaiser la colère naissante des Judéens. Malgré son grand âge, il se rendit en Égypte auprès d’Adrien. Celui-ci resta sourd à tout conseil et à tout avertissement, et il accabla de railleries les religions judaïque, samaritaine et chrétienne, qu’il se flattait de connaître et qu’il déclarait proches parentes des croyances égyptiennes. Il écrivit à cette époque à son beau-frère : « Les archisynagogues, les Samaritains et les prêtres chrétiens n’adorent d’autre