Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/462

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Sous le règne des sultans Bajazet et Sélim Ier, et peut-être aussi de Soliman, Elia fut membre du divan, comme son prédécesseur, et représenta officiellement le judaïsme turc. Son érudition talmudique, ses connaissances variées et son caractère ferme et loyal le rendaient, du reste, digne de ces hautes fonctions.

Élève de maîtres allemands, Elia Mizrahi (né vers 1455 et mort vers 1525-1527) était un excellent talmudiste, d’une piété rigoureuse, mais sans se déclarer pourtant ennemi des études profanes. Prompt à la lutte dans sa jeunesse, il s’attaqua aux Caraïtes de la Turquie. Plus tard, quand l’âge eut modéré sa fougue, il se montra plus bienveillant envers ses anciens adversaires et les défendit même contre les obscurantistes. Plusieurs de ces derniers, notamment des membres de la communauté d’Apulie à Constantinople, voulaient, en effet, faire cesser les relations amicales existant entre les Caraïtes et les rabbanites. Ils réunirent donc un jour leur communauté et déclarèrent, un rouleau de la Tora sur le bras, qu’ils excommunieraient tout membre qui enseignerait la Bible, le Talmud ou même des sciences profanes, telles que les mathématiques, l’histoire naturelle, la logique ou la musique, à des Caraïtes jeunes ou vieux. Ils défendirent également aux domestiques rabbanites de servir chez des Caraïtes. Comme ils savaient que la plupart des Juifs de Constantinople blâmaient les mesures qu’ils avaient prises contre les Caraïtes, ils vinrent à la synagogue, le jour où tous les groupes devaient délibérer ensemble sur cette question, avec une populace armée de gourdins pour empêcher leurs adversaires de prendre la parole. Leurs résolutions contre les Caraïtes furent ainsi adoptées en public, malgré l’opposition d’une forte majorité. Mais Elia Mizrahi intervint énergiquement pour annuler leurs délibérations.

Outre leur grand-rabbin, les Juifs de l’empire ottoman avaient encore un représentant politique (kahiya), qui avait accès auprès du sultan et des hauts dignitaires et recevait son investiture de la cour. Sous Soliman, cette fonction fut exercée par Schaltiel, dont les contemporains louaient les sentiments élevés. Quand on connaît le dédain que les Turcs manifestaient autrefois pour les autres croyants, juifs ou chrétiens, l’arbitraire qui régnait dans les administrations des pachas de province, et le fanatisme des