Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/107

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ils précipitèrent des femmes et des enfants juifs dans les flammes et pillèrent les biens des sinistrés.

Bientôt, une catastrophe plus générale menaça les Juifs de Prague. L’empereur Ferdinand Ier, si humain à l’égard des catholiques et des protestants, se montrait implacablement hostile aux Juifs. Le premier il imposa aux Juifs d’Autriche la déclaration (Zettelmeldung ou Judenzettel). Tout Juif autrichien qui se rendait à Vienne pour affaires était obligé de se présenter, dès son arrivée, dans les bureaux du gouverneur et de déclarer pour quelles affaires et pour combien de temps il était venu dans cette ville. Après avoir encore pris d’autres mesures restrictives contre les Juifs, Ferdinand Ier décréta leur expulsion de la Basse-Autriche et de Gœrz, leur fixant la Saint-Jean comme dernière limite de leur séjour. On leur accorda pourtant des délais pendant deux ans, mais, à la fin, ils durent se résigner à prendre le chemin de l’exil.

Les Juifs de Prague ne tardèrent pas à subir le même sort. Cette communauté ne jouissait pas alors d’une grande estime auprès des autres Juifs ; on lui reprochait de manquer de dignité et de scrupules, et de se laisser aller volontiers aux querelles et à la violence. La nomination des rabbins et des administrateurs donnait lieu, chaque fois, à des débats si irritants que l’empereur décida de la confier aux rabbins les plus considérés de l’Allemagne et de l’Italie. Quand, après un exil de vingt ans, les Juifs purent revenir à Prague, il n’y eut presque que la lie qui profita de cette autorisation. Celte catégorie de Juifs produisit naturellement une impression très défavorable sur la population chrétienne, dont les préjugés contre les Juifs en général devinrent encore plus accentués. Les chrétiens de cette classe ne valaient pourtant pas mieux. Mais, de tout temps, la société chrétienne a jugé ses propres membres avec une indulgence excessive, tandis qu’elle a exigé des Juifs, même de la plus basse classe, la pratique de toutes les vertus. Cependant, lorsque Ferdinand Ier proposa de chasser de nouveau les Juifs de Prague, sa proposition rencontra une certaine résistance, surtout de la part des archiducs du pays. Leur expulsion eut lieu quand même (1561). Mais après leur départ, la noblesse commença des démarches, comme après leur