Aller au contenu

Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/150

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

on ensevelit dans ce cimetière un personnage considérable, Elia Felice Montalto, ancien Marrane qui avait embrassé le judaïsme. C’était un médecin habile et un élégant écrivain, qui avait habité Livourne, Venise et, en dernier lieu, Paris, comme médecin de la reine Marie de Médicis ; il mourut pendant qu’il se trouvait à Tours avec la cour de France (février 1616). Sur l’ordre de la reine, son corps fut embaumé et transporté au cimetière d’Oudekerk, accompagné de son oncle, de son fils et de son élève Saül Morteira. Pendant un certain temps, les Juifs d’Amsterdam durent payer une taxe aux autorités ecclésiastiques pour chaque mort qu’ils enterraient dans leur cimetière.

En général, dans les premières années de leur séjour à Amsterdam, les Juifs furent en butte à la suspicion des hollandais. On craignait qu’ils ne servissent d’espions à l’Espagne. Même quand ils eurent manifestement prouvé leur haine contre la Péninsule ibérique, où ils avaient tant souffert, ils ne furent que difficilement tolérés. Les combats que les bourgeois protestants avaient soutenus pour leurs croyances et les luttes intestines de secte à secte les avaient mai préparés à supporter une autre confession à côté de la leur. Mais peu à peu, on apprécia l’utilité incontestable, pour le commerce d’Amsterdam, de leurs capitaux et de leur expérience, ils se firent aussi estimer pour la culture de leur esprit, la dignité de leur tenue et l’élégance de leur langage. Même leurs noms pompeux, qui rappelaient la plus vieille noblesse castillane et qu’ils tenaient de leurs parrains chrétiens, contribuaient à leur donner un certain prestige aux yeux des bourgeois hollandais. En peu d’années, la communauté d’Amsterdam compta quatre cents familles, possédant trois cents maisons ; elle créa une imprimerie hébraïque, qui pouvait éditer des ouvrages hébreux sans les soumettre préalablement à la censure.

Jaloux des avantages que le séjour des Juifs assurait à Amsterdam, plusieurs princes chrétiens s’efforcèrent d’en attirer également dans leurs pays. Christian IV, roi de Danemark, sollicita des administrateurs de la communauté l’envoi d’un certain nombre de Juifs dans ses États, leur promettant d’autoriser l’exercice de leur culte et de leur accorder encore d’autres privilèges. Le duc de Savoie appela des Juifs portugais à Nice, et le