Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/169

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pour les Juifs éloignés des premiers champs de bataille. Ils ne pouvaient échapper à la fureur des Zaporogues qu’en passant la frontière de la Valachie. L’immense espace qui s’étend depuis la sud de l’Ukraine jusqu’à Lemberg, en passant par Dubno et Brody, était semé de cadavres juifs. Dans la ville de Bar, on en tua de 2.000 à 3.000. Pas plus les Cosaques réguliers que les sauvages haidamaks ne faisaient de différence entre les rabbanites et les caraïtes ; ils massacraient tout, sans distinction. Aussi ne resta-t-il que de rares débris des quelques communautés caraïtes de Pologne. À Lemberg, beaucoup de rabbanites succombèrent à la faim et à la maladie, et la communauté dut remettre tous ses biens aux Cosaques pour prix de sa rançon. De Lemberg, Chmielnicki se rendit avec ses troupes à Zamose pour se rapprocher de Varsovie et faire valoir son avis dans l’élection du roi.

À Narol, qu’ils rencontrèrent sur leur chemin, les Zaporogues accomplirent un épouvantable carnage (au commencement de novembre). On évalue le nombre des victimes à 45.000, dont 12.000 Juifs. Les haidamaks se répandirent ensuite dans la Volhynie, la Podolie et la Russie occidentale, semant partout la ruine et la mort. Dans plusieurs villes, Juifs et catholiques prirent les armes et réussirent à chasser ces bandes sanguinaires.

À la suite de l’élection du rai de Pologne, la lutte cessa quelque temps. Après avoir fait nommer son candidat, Jean-Casimir, primat de Gnesen, Chmielnicki se décida à abandonner la région où il avait accumulé tant de ruines ; il retourna dans l’Ukraine. Les commissaires polonais le rejoignirent dans sa résidence pour traiter avec lui de la paix. Comme il exigeait qu’il n’y eût plus dans les provinces cosaques ai église catholique ni Juifs et que les délégués polonais ne voulaient pas y souscrire, les pourparlers furent rompus (16 février 1649). Une troisième fois, la guerre recommença. Dans la rencontre qui eut lieu près de Sbaraz, l’armée polonaise était menacée d’une complète destruction quand le roi eut l’idée de s’adresser, pour la conclusion de la paix, au chef des Tartares (août 1649). Les conditions imposées ne différèrent pas beaucoup de celles qu’avait proposées Chmielnicki ; les