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Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/220

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Dans les communautés, les querelles entre adeptes et adversaires de Sabbataï auraient pu devenir funestes, si les rabbins n’avaient pas énergiquement recommandé de s’abstenir de toute moquerie à l’égard de ceux qui avaient naïvement cru à la mission du prétendu Messie.

Tous ne se résignèrent pourtant pas à la perte de leurs illusions. Pour beaucoup de ses partisans, Sabbataï ne s’était point fait Turc : son ombre seule était restée sur la terre, mais lui-même était monté au ciel ou s’était réfugié auprès des dix tribus, pour reprendre son œuvre de délivrance à un moment plus propice. Ses prophètes surtout, Samuel Primo, Jacob Faliagi, Jacob Israël Duhan, s’efforcèrent de maintenir la foule dans son erreur et de raffermir l’autorité de Sabbataï. Les rabbins durent intervenir énergiquement pour mettre fin à cette nouvelle propagande. Nathan de Gaza fut excommunié. Mais l’agitation continua. Un des chefs, probablement Samuel Primo, déclara que Sabbataï avait prouvé l’authenticité de sa mission messianique par sa conversion même : c’était prédit dans le Zohar. C’est ainsi que Moïse, le premier libérateur, avait dû vivre à la cour de Pharaon en Égyptien avant de sauver son peuple. Renégat en apparence, mais au fond pur et saint, tel était le nouveau mot d’ordre des partisans de Sabbataï.

Appuyé, d’une part, par les prédications de Nathan de Gaza et, de l’autre, par le zèle de son entourage, Sabbataï conserva un grand nombre de fidèles. Dans les premiers temps qui suivirent son apostasie, il dut naturellement se tenir éloigné des Juifs et du judaïsme et se montrer fervent musulman. Mais peu à peu, dans le désir de reprendre son rôle de Messie, il renoua des relations avec les Juifs et se déclara de nouveau inspiré de l’esprit saint et favorisé de révélations divines. Il fit publier un ouvrage mystique où l’on affirmait que Sabbataï était le vrai Messie et qu’il pourrait multiplier les preuves de son pouvoir, mais qu’il s’était couvert du masque de l’islamisme pour propager plus facilement les croyances juives. Au sultan, au contraire, et au mufti il déclarait qu’il restait en rapports avec les Juifs pour les convertir à la religion musulmane. Il réussit ainsi à se faire autoriser à prêcher dans les synagogues d’Andrinople. Pourtant,