Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/224

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ne tarda pas à imiter l’exemple de sa mère et à faire décréter l’expulsion des Juifs de Vienne et de l’archiduché d’Autriche. Depuis l’avènement de Léopold Ier, les Jésuites étaient tout-puissants en Allemagne. Ils ne cessaient d’exciter la cour et le peuple coutre tous les non catholiques, contre les protestants en Hongrie, les huguenots en France et les dissidents en Pologne. Les Juifs, établis de nouveau à Vienne depuis environ un demi-siècle, souffraient également de ces excitations. Trouvait-on un chrétien assassiné ou noyé ? on en accusait immédiatement les Juifs, que l’on cherchait, en outre, à rendre odieux par des chansons, des libelles venimeux et des images. Après une assez longue résistance de l’empereur, les Jésuites réussirent à faire proclamer à son de trompe (14 février 1670) l’ordre aux Juifs de partir de Vienne et des environs.

Bouleversés par ce décret d’expulsion, les Juifs sollicitèrent l’intervention d’un de leurs coreligionnaires les plus riches et les plus influents de ce temps, Manoël Texeira, représentant de la reine Christine à Vienne. Texeira demanda à quelques grands d’Espagne avec lesquels il était en relations d’agir sur le confesseur de l’impératrice. Il s’adressa aussi au puissant et habile cardinal Azzolino, à Rome, ami de la reine Christine. Celle-ci, qui, depuis sa conversion, jouissait d’une grande influence dans le monde catholique, promit aussi son appui à Texeira. Tout fut inutile. L’empereur, ou plutôt l’impératrice, maintint l’édit d’expulsion et disposa même des maisons des Juifs avant qu’ils ne fussent partis. Elle fut pourtant assez humaine pour défendre à ses sujets de maltraiter les exilés.

Les Jésuites triomphèrent pour la plus grande gloire de Dieu ; les Juifs furent contraints d’émigrer. Le Magistrat de Vienne acheta le quartier juif pour cent mille florins, et, en l’honneur de l’empereur, l’appela Leopoldstadt. Sur l’emplacement de la synagogue on éleva une église, dont Léopold le posa la première pierre (18 août 1670). Les exilés se répandirent à travers la Moravie, la Bohème et la Bavière, où ils furent provisoirement autorisés à se fixer ; la Hongrie leur resta fermée.

Malheureux d’un côté, les Juifs de cette époque étaient plus heureux dans d’autres contrées. Le Brandebourg, qui n’avait