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Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/320

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plusieurs Juifs distingués. Plein d’admiration pour Mendelssohn et pressentant l’avantage que la France pouvait tirer des Juifs, asservis depuis des siècles, si elle les appelait à la liberté, il résolut de faire connaître au public français le mouvement de rénovation qui s’accomplissait alors en Allemagne. C’est ainsi qu’il publia son opuscule si rempli de choses : Sur Moses Mendelssohn et sur la réforme politique des Juifs (1787). Il y expose brièvement l’histoire tragique des Juifs et y fait ressortir le martyre glorieux de ce peuple et la cruauté de ses persécuteurs. Voulez-vous, dit-il, que les Juifs deviennent des hommes meilleurs, des citoyens utiles ? Bannissez de la société toute distinction avilissante pour eux, ouvrez-leur toutes les voies de subsistance et d’acquisitions. Veillez à ce que, sans négliger la doctrine sacrée de leurs pères, les Juifs apprennent à mieux connaître la nature et son auteur, la morale et la raison, les principes de l’ordre, les intérêts du genre humain, de la grande société dont ils font partie. Il répond ensuite aux accusations formulées contre les Juifs et termine par ces paroles chaleureuses : Voulez-vous enfin que les prétendus vices des Hébreux soient si profondément enracinés qu’ils ne puissent disparaître qu’à la troisième ou quatrième génération ? Eh bien ! commencez tout à l’heure ; car ce n’est pas une raison pour reculer cette grande réforme politique d’une génération, puisque sans cette réforme on ne verrait jamais une génération corrigée, et la seule chose que vous ne puissiez pas reconquérir, c’est le temps perdu. Mirabeau saisit toutes les occasions pour plaider la cause des Juifs et dissiper les préjugés que Voltaire avait répandus en France contre eux.

Ailleurs aussi on s’occupait à ce moment des Juifs. En Alsace, les Juifs se plaignaient des humiliations et des souffrances qu’on leur infligeait, et les chrétiens accusaient les Juifs de les réduire à la misère. À Metz parut un pamphlet : Cri des citoyens contre les Juifs, qui contenait les plus haineuses excitations. Ce réquisitoire venimeux fut réfuté par un écrivain instruit et éloquent, Isaïe Berr Bing (1759-1805), qui connaissait mieux l’histoire de son peuple que la plupart de ses contemporains juifs, sans excepter les savants de Berlin.