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Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/322

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faveur des Juifs, où il demandait leur assimilation aux autres citoyens. Arrive ensuite la fameuse nuit du 4 août où la noblesse sacrifia ses privilèges sur l’autel de la patrie. Encouragés par ce mouvement généreux, les Juifs multiplièrent leurs efforts pour être déclarés citoyens. Des Juifs de Bordeaux s’enrôlèrent dans les rangs de la garde nationale, et l’un d’eux fut même nommé capitaine. À Paris aussi, de nombreux Juifs faisaient partie de la garde nationale et rivalisaient avec les autres Parisiens de patriotisme et de courage civique. Onze délégués se rendirent à l’Assemblée pour lui présenter une Adresse où ils demandaient à être soumis, comme tous les Français, à la même jurisprudence, à la même police, aux mêmes tribunaux. À la tête de cette délégation se trouvaient un hollandais, Jacob Goldschmidt, et un Portugais, Lopez Laguna.

Cependant, dans le sein même de l’assemblée, il existait des préjugés religieux contre les Juifs. Lorsqu’un député, M. de Castellane, eut proposé un article ainsi conçu : Nul homme ne doit être inquiété pour ses opinions religieuses, ni troublé dans l’exercice de son culte, des prêtres catholiques, appuyés par un certain nombre de laïques, firent entendre de violentes protestations. Mais un autre député, Rabaud-Saint-Étienne, appuya énergiquement la motion de Castellane. Après avoir fait observer qu’il représentait une population de 500.000 âmes, dont 120.000 étaient protestants, et qu’il ne pouvait pas admettre que ces derniers fussent exclus de toutes les fonctions et de toutes les dignités, il ajouta : Je demande la liberté pour ces peuples toujours proscrits, errants, vagabonds sur le globe, ces peuples voués à l’humiliation, les Juifs. Malgré une vive opposition, la motion fut adoptée et inscrite en tête de la Constitution de 1791 dans les termes suivants : Nul ne doit être inquiété pour ses opinions même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi. Cet article est aujourd’hui un des principes fondamentaux des Constitutions européennes.

Ainsi, les Juifs avaient reçu satisfaction sur un point important. Mais leur cause n’était pas encore gagnée ; leurs adversaires travaillaient activement à les tenir exclus de tous les droits de citoyen. La question juive fut de nouveau discutée (