Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/329

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que les Juifs bataves, du moins ceux d’entre eux qui le désireraient, jouiraient de la plénitude des droits de citoyen.

En général, ce décret ne provoqua pas un grand enthousiasme parmi les Juifs de Hollande. C’est qu’ils avaient joui jusqu’alors d’une plus grande liberté que leurs coreligionnaires de France et d’autres pays, et qu’ils ne voyaient dans leur émancipation que les nouvelles charges qui allaient peser sur eux et les dangers qui menaçaient leur religion. Loin de se réjouir de leur affranchissement, ils en voulaient aux hommes de courage et d’initiative qui y avaient contribué. De là, dans les communautés d’Amsterdam, des discussions et des dissentiments entre les partisans de l’ancien régime et les amis de l’émancipation et des réformes. Ces derniers, principalement dans la communauté allemande, demandèrent, en effet, comme conséquence de la proclamation de l’émancipation, l’abrogation des pouvoirs excessifs des rabbins et des Parnassim. Sur le refus des administrateurs de faire droit à leur requête, ils se séparèrent de la communauté établie et en organisèrent une nouvelle (vers la fin de 1796), qu’ils appelèrent Adat Yeschouroun et où ils introduisirent plusieurs réformes. Ainsi, dans la prière des Dix-Huit Bénédictions, ils supprimèrent le paragraphe Welamalschinim, composé à l’origine contre les Judéo-Chrétiens, mais que des ignorants appliquaient à tous les chrétiens sans exception ; ils défendirent aussi les inhumations précipitées et construisirent un nouvel établissement de bains pour la communauté, plus propre et plus confortable que l’ancien. Ces réformes, si innocentes en réalité, excitèrent la colère des rigoristes, qui menacèrent de mort les membres de la nouvelle communauté et auraient mis leurs menaces à exécution sans l’intervention de la force armée. Pourtant, malgré l’appui, assez inexplicable, que leur prêtaient les autorités de la ville, les Parnassim de la communauté allemande, plus tyranniques encore que leurs collègues portugais, durent résigner leurs fonctions. Dans la nouvelle administration entrèrent aussi des réformateurs. Peu à peu les haines s’apaisèrent et les rigoristes se réconcilièrent avec le nouvel état de choses. Ils étaient, du reste, flattés que deux Juifs d’Amsterdam, Bromet et De Lémon, eussent été élus comme députés de l’Assemblée batave. Plusieurs d’entre eux se rendirent