Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/377

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culte protestant, et comme, d’autre part, cette communauté rejetait la croyance à la venue du Messie, il devenait difficile de déterminer exactement la position occupée par le judaïsme par rapport au christianisme. On espérait bien, par toutes ces réformes, ramener à la religion juive ceux qui s’en tenaient éloignés. Mais, sauf quelques exceptions, cette espérance ne se réalisa point.

À la suite de l’organisation du parti de la réforme à Hambourg, le judaïsme allemand se divisa en deux camps. Jusqu’alors, les Juifs allemands avaient été altmodisch, de l’ancienne mode, ou neumodisch, de la mode nouvelle, comme ils se qualifiaient eux-mêmes. Mais il n’existait pas de partis bien tranchés, ayant leurs mots d’ordre, leur drapeau et leurs chefs reconnus. Les partisans de l’ancienne mode formaient la très grande majorité, mais manquaient de cohésion et de direction. Les rabbins, originaires pour la plupart de la Pologne, avaient rapidement perdu toute autorité, et, dans de brandes communautés, on s’abstenait de nommer de nouveaux titulaires aux sièges rabbiniques devenus vacants. On ne voulait plus en faire venir de Pologne et on n’en trouvait pas encore, à ce moment, en Allemagne. À Berlin, à Prague et ailleurs, à la place des rabbins, on nomma des administrateurs de rabbinat, fonctionnaires hybrides, sans indépendance, se laissant absolument dominer par les chefs laïques des communautés.

On ne trouvait alors que quatre rabbins orthodoxes jouissant d’une réelle autorité et profondément estimés pour leur caractère élevé et leurs vastes connaissances talmudiques : Mardochaï Benet, à Nikolsbourg (mort à Carlsbad en 1829), Jacob Lissa, à Lissa, en Pologne (mort en 1832), Akiba Eger, à Posen (mort en 1838), et son gendre, Mosché Sofer (mort à Presbourg en 1840).

Le plus vénéré de tous était Akiba Eger, dont la sincère piété, l’esprit généreux et les rares vertus lui avaient acquis le respect des milliers de disciples sortis de son école à Friedland et à Posen. Mais il manquait d’initiative et aimait à se tenir dans une ombre discrète. Mosché Sofer, par contre, était actif, remuant, plein de courage et de résolution, animé d’un zèle fanatique, et