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Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/386

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ils osèrent enfin relever la tête, rivaliser avec les confessions plus jeunes pour accomplir leur mission jusqu’au bout, et ils ne rougissaient plus d’avouer ouvertement leur origine et leurs croyances.

Ce fut à l’histoire d’Israël que s’intéressa tout d’abord la science juive de ce temps. Cette histoire avait été présentée jusqu’alors sous un faux jour, ou était totalement ignorée. Au milieu de leurs souffrances et de leurs pérégrinations forcées, les Juifs n’avaient pu conserver intact le souvenir de tous les événements de leur passé ; ils ne les connaissaient plus qu’en partie, et parfois totalement travestis. Des savants chrétiens, séduits par la grandeur du sujet, avaient essayé de former un tour complet des fragments qu’ils avaient à leur disposition. Mais ils n’avaient réussi qu’à tracer une image inexacte, parce qu’elle était incomplète, qu’en bien des endroits les couleurs étaient effacées et que l’ombre dominait. Les défenseurs mêmes des Juifs, comme Dohm et l’abbé Grégoire, qui s’étaient appliqués à étudier les annales du judaïsme, n’avaient produit qu’une œuvre très imparfaite. Isaac-Marcus Jost (1793-1860), le premier, présenta, enfin, un aperçu complet de l’histoire des Juifs. Zunz, avec son esprit vaste et profond, aurait été plutôt désigné pour une telle œuvre, mais il n’eut pas le courage de l’entreprendre. Quoiqu’il ne possédât que des matériaux insuffisants, Jost se mit avec ardeur à ce travail gigantesque. Il a le grand mérite d’avoir fourni à ses successeurs un fil conducteur pour se diriger dans l’immense labyrinthe de l’histoire juive.

Jost fut amené à écrire l’histoire des Juifs par les attaques violentes de Rühs et de ses disciples. Aux mensonges volontaires ou involontaires de ces pamphlétaires, il tenait à opposer des faits certains. Son principal but était de prouver qu’en tout temps les Juifs s’étaient montrés citoyens paisibles et fidèles sujets. S’ils s’étaient révoltés contre les empereurs romains et avaient, soutenu vaillamment la lutte, c’est qu’ils y avaient été poussés par un groupe d’hommes fougueux et passionnés, les zélateurs. Mais il serait inique de rendre la nation entière responsable de la faute de quelques-uns. En général, les Juifs furent de braves gens qui ne tuèrent jamais d’enfants chrétiens