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Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/410

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Lehren, d’Amsterdam, unirent leurs efforts pour faire proclamer l’innocence des martyrs de Damas. À la Chambre des députés, à Paris, Achille Fould interpella Thiers et le harcela avec tant d’insistance que celui-ci dut recourir, pour lui répondre, à des faux-fuyants et à des mensonges (2 juin). Fould fut appuyé, dans son interpellation, par deux de ses collègues chrétiens, le comte Delaborde et Isambert.

Dans la vivacité de ses ripostes, Thiers se laissa même entraîner à parler avec une certaine malveillance des Juif. Ils ont soulevé un véritable orage, disait-il, dans toute l’Europe, se sont adressés à toutes les chancelleries et ont prouvé qu’ils n’ont pas aussi peu d’influence qu’on le croit. Il aurait pourtant dû trouver naturel qu’ils réunissent leurs forces en face de la coalition cléricale qui, en France, en Italie et en Belgique, s’efforçait d’égarer l’opinion publique sur cette affaire de Damas et de représenter les Juifs de tous les pays comme des hommes capables de tous les crimes. En Italie, la censure défendait la publication de tout document tendant à démontrer l’innocence des Juifs de Damas et à incriminer Ratti-Menton. Un journal français ayant adjuré tous les convertis juifs de déclarer sur leur âme et conscience si, oui ou non, la littérature juive contient quelque chose qui puisse faire croire à la réalité du meurtre imputé à leurs anciens coreligionnaires de Damas, ou s’ils savaient que jamais un Juif eût commis un tel crime, plusieurs renégats juifs exerçant des fonctions ecclésiastiques parmi les protestants, entre autres Auguste Neander, l’auteur bien connu d’une histoire de l’Église, affirmèrent hautement l’innocence des Juifs. Parmi les catholiques, un seul eut ce courage, l’abbé Veith, prédicateur de la cour à Vienne ; les abbés Drach, Liebermann et Ratisbonne, comme s’ils avaient obéi à un ordre, gardèrent le silence.

C’était donc une nécessité pour les Juifs, devant les efforts de leurs ennemis, de se grouper en un faisceau compact pour tenir en échec cette nouvelle tentative de persécution. Leurs coreligionnaires de Damas, Beyrouth, Alexandrie et Constantinople ne cessaient de supplier ta famille Rothschild, Moses Montefiore, Crémieux et Hirsch Lehren de leur venir en aide, et leur affirmaient qu’on n’obtiendrait de résultat que par des démarches