Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/97

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aux ordres des moines. Pourtant, le successeur de Jules III, Marcel II, fut assez équitable pour ne pas accueillir une accusation de meurtre rituel dirigée contre les Juifs de Rome. Mais après lui, le Saint-Siège fut occupé par le fanatique Caraffa, élu pape sous le nom de Paul IV (mai 1555-août 1559). Ce pontife haïssait les Juifs, les protestants et même, ce qui parait plus singulier, le sombre roi Philippe II et les Espagnols, qu’il appelait descendants corrompus de Juifs et de Maures. Dès son avènement, il imposa à chaque synagogue de ses États une taxe de 10 ducats pour l’entretien de l’établissement des catéchumènes, où l’on instruisait des Juifs pour les convertir au catholicisme. Par une seconde bulle (12 juillet 1555), il remit en vigueur les anciennes lois canoniques qui interdisaient aux Juifs l’exercice de la médecine et la possession de biens-fonds ; on leur accorda un délai de six mois pour vendre leurs immeubles. Ils durent céder leurs biens-fonds, évalués à 500.000 couronnes d’or, pour le cinquième de leur valeur. Il fut aussi défendu aux chrétiens de qualifier un Juif de monsieur. Ces lois furent appliquées avec une extrême rigueur. Bien des Juifs émigrèrent alors de Rome dans des pays plus tolérants. Ceux qui restèrent eurent à subir les vexations du pape. Tantôt il les accusait de n’avoir vendu leurs immeubles quo par des contrats fictifs, et il les faisait jeter en prison, tantôt il menaçait d’expulsion tous ceux qui ne travailleraient pas dans l’intérêt général. Quand ils demandèrent ce qu’il fallait entendre par ces mots : travailler dans l’intérêt général, on leur répondit qu’ils le sauraient plus tard. Ils furent soumis aux plus dures corvées pour aider à réparer les remparts de Rome, qu’on mettait en état de soutenir les attaques des Espagnols. Un jour, dans un moment de fureur, Paul IV ordonna à son neveu de mettre le feu, pendant la nuit à toutes les maisons juives. Informé de cet ordre féroce, le cardinal Alexandre Farnèse y fit surseoir pour laisser au pape le temps de réfléchir aux conséquences d’une telle cruauté. Paul IV revint, en effet, sur sa décision.

Plus misérables que les Juifs étaient les Marranes des États pontificaux. Sous Clément VII, de nombreux Marranes du Portugal avaient pu s’établir à Ancône et retourner au judaïsme. Les deux papes suivants, Paul III et Jules III, avaient confirmé les privilèges