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Page:Grammont - Petit traité de versification française, 1908.djvu/117

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Les voyelles éclatantes. — L’emploi des voyelles éclatantes, a, o ouvert, eu ouvert (et e), an (en), un (eun) s’impose pour l’expression des bruits éclatants ; ce sont elles qui donnent son expression au mot éclatant lui-même, et en outre à fracas, craquer, sonore, cataracte, etc. :

Tout à coup, écrasant l’ennemi qui s’effare,
LA victOIre aux cENt vOIx sOnnErA sA fANfAre.

(Hugo, À l’Arc de Triomphe)

Quand, parmi les voyelles éclatantes, quelques-unes sont nasales, le bruit éclatant est un peu voilé par la nasalité :

Le lion qui jadis au bOrd des flOts rOdANt
Rugissait AUssi hAUt quE l’OAN grONdANt.

(Hugo, Les Lions)

En dehors des bruits physiques, les voyelles éclatantes conviennent au développement des idées et des sentiments dont l’expression suppose des éclats de voix. Telle la colère :

Voulez-vous que je dise ? Il faut qu’enfin j’éclAte,
Que je lève le mAsque, et déchArge mA rAte.

(Molière, Les Femmes savantes)

Tel l’orgueil :

VOIx dE l’OrgUEil : UN cri puissANt cOmmE d’UN cOr,
Des étOIlEs dE sANg sur des cuirAssEs d’Or.

(Verlaine, Sagesse)

Est-il quelque ennemi qu’À présENt jE nE dOMpte
PAraissez, NAvArrois[1], MAUrEs et CAstillANs,
Et tOUt cE quE l’EspAgne A nourri dE vAillANts !

(Corneille, Le Cid)
  1. Au xviie siècle oi se prononçait .