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Page:Grammont - Petit traité de versification française, 1908.djvu/16

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2. DEUX VOYELLES EN CONTACT, DONT AUCUNE N’EST UN E.

Les règles anciennes. — En ancien français la question est très simple pour qui connaît l’histoire de la langue ; elle est inextricable pour qui l’ignore. On peut distinguer trois cas :

α. — Les deux voyelles françaises constituent une diphtongue qui représente une seule voyelle latine ou une voyelle et une consonne ; elles ne font qu’une syllabe. Tel est le mot pied dont la diphtongue ie sort du premier e de latin pedem ; tel est le mot nuit dont la diphtongue ui sort de l’o et du c de latin noctem.

β. — Les deux voyelles françaises représentent deux voyelles latines, qui étaient séparées en latin par une consonne, comme dans lier de latin ligare, ou y étaient déjà contiguës, comme dans fusion de fusionem. Dans l’une et l’autre condition elles constituent deux syllabes ; mais il est bon de remarquer que les mots de la première catégorie appartiennent à l’ancien fonds de la langue française, tandis que ceux de la seconde font partie d’une couche plus récente. Ce sont des mots calqués sur le latin classique, car le latin vulgaire ne connaissait plus d’i en contact avec une voyelle suivante ; il en avait fait une consonne, y, qui se prononçait comme l’i de notre mot tien et que l’on appelle yod ; le mot fusionem y était donc devenu fusyonem, qui a donné dans le français de la première heure foison.

γ. — Des deux voyelles françaises l’une est la finale d’un mot simple et l’autre l’initiale d’un suffixe qui s’est adjoint au radical pour en tirer un dérivé en