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Page:Grammont - Petit traité de versification française, 1908.djvu/79

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Dans ce passage les deux alexandrins introduisent un style pompeux destiné à peindre l’orgueil du chêne ; quant à l’octosyllabe qui vient après il met en relief l’idée importante qui s’oppose à la faiblesse du roseau et prépare le dénouement. On trouve le même ton orgueilleux dans les alexandrins du morceau suivant :

Et de me laisser à pied, moi,
Comme un messager de village ;
Moi qui suis, comme on sait, en terre et dans les cieux,
Le fameux messager du souverain des dieux.

(Molière, Amphitryon)

Mise en relief par les grands vers. — Quand l’effet n’est produit que par le changement de mètre, c’est un simple effet de contraste aboutissant à la mise en relief de l’idée contenue dans le mètre nouveau :

Deux compagnons pressés d’argent,
À leur voisin fourreur vendirent
La peau d’un ours encor vivant,
Mais qu’ils tueroient bientôt, du moins à ce qu’ils dirent.

(La Fontaine, Fables, V, 20)

Laissez-moi carpe devenir :
Je serai par vous repêchée ;
Quelque gros partisan m’achètera bien cher.

(id., V, 3)

Expression d’un changement. — Puisqu’un changement de mètre produit un changement d’impression, il est tout naturellement propre à traduire un contraste qui existe dans les idées :

La jeunesse se flatte et croit tout obtenir ;
La vieillesse est impitoyable.

(id., XII, 5)