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observe l’alternance des rimes masculines et féminines et on évite la succession de deux rimes plates. Dans la strophe de quatre vers les deux rimes peuvent donc être croisées :

Au banquet de la vie, infortuné convive,
J’apparus un jour, et je meurs !
Je meurs, et sur ma tombe, où lentement j’arrive,
Nul ne viendra verser des pleurs.

(Gilbert, Odes)

ou embrassées :

Sur la mer qui roule
Et vomit l’embrun,
Le ciel lourd et brun
En trombe s’écroule.

(Richepin, La Mer)

La strophe de cinq vers admet toutes les combinaisons possibles de ses deux rimes. Celle de six peut être sur deux rimes ou sur trois ; quand elle est sur trois on évite, de peur d’égarer l’oreille, d’y mettre trois vers de suite sur trois rimes différentes.

L’unité de la strophe. — Une strophe ne doit pas être composée de plusieurs parties qui, isolées, constitueraient chacune une strophe plus petite. Ce n’est que par une convention que l’on peut appeler strophe de huit vers celle-ci :

Sa grandeur éblouit l’histoire.
Quinze ans il fut
Le dieu qui traînait la victoire
Sur son affût ;
L’Europe sous sa loi guerrière
Se débattit.
Toi, son singe, marche derrière
Petit, petit.

(Hugo, Châtiments)