Page:Grave - L’Anarchie, son but, ses moyens.djvu/92

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s’agit d’oublier les clauses du programme qui vous a fait élire, les socialistes ne diffèrent pas des autres politiciens.

S’ils ont combattu certaines restrictions à la liberté de penser et d’écrire, c’est qu’ils avaient peur que les lois proposées se retournent contre eux. Chaque fois qu’il leur a semblé qu’elles ne pouvaient être dangereuses qu’à leurs adversaires, ils se sont abstenus quand ils n’osaient pas les légitimer. En tous cas, le plus souvent, quand ils les combattaient, c’était sur leur mode d’application et non pour le principe même.

Et lorsque, à un moment où le ministère s’appuyait sur eux, ils se refusèrent de voter l’abrogation des « lois scélérates » pour ne pas compromettre leur ministère, ils savaient que si on les appliquait, ce ne serait pas contre eux !

Et, pour l’affaire Dreyfus, les députés socialistes se sont-ils distingués des monarchistes ? Ne les avons-nous pas vus se mettre docilement à la remorque du pouvoir et voter toutes les mesures capables d’empêcher la vérité de se faire jour ? Y en a-t-il eu un seul qui ait osé élever la voix pour réclamer ce qu’exige la plus vulgaire honnêteté ?

Et lorsque nous savons que, quelle que soit l’étiquette de ceux qui seront au pouvoir, nous aurons à payer les pots cassés, peut-on nous faire un grand crime de nous désintéresser de la façon dont ils s’y seront hissés et que nous nous refusions à leur faire la courte échelle ?