Page:Grave - La Grande Famille.djvu/112

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tre côté de la voie, le long des trottoirs, il chercha un regard ami ; dans sa détresse, une parole de sympathie lui aurait fait du bien ; mais il ne reconnut personne. Son trouble était si grand que, sans réfléchir que si son père eût été dans cette foule, il l’eût certainement appelé, il resta planté devant cette cohue de têtes, cherchant, mais en vain ; personne n’était là pour lui.

Deux conscrits qui habitaient la même maison que lui, vinrent à sortir de la salle du tirage, ils avaient de bons numéros, et l’entraînèrent avec eux. Des camarades d’atelier les accompagnaient.

On reprit alors le chemin du logis. Les autres conscrits et leurs camarades étaient fortement éméchés déjà. Ils voulurent à toute force mettre un numéro à la casquette de Caragut qui dut se laisser faire, les autres ne comprenant pas qu’on pût ne pas se plier à une habitude traditionnelle, et la bande partit en chantant.

Lui, réfléchissait, il se voyait, en dépit de son aversion, forcé d’endosser la livrée militaire, et, malgré lui, l’idée d’insoumission se présenta à son cerveau.

Est-ce qu’il aurait la patience de subir ce qu’il appelait cinq ans de bagne ? Aurait-il la fermeté de résister aux tracasseries du métier qu’il ne connaissait pas, mais dont il se faisait une idée à peu