Page:Grave - La Grande Famille.djvu/113

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près par les récits de ceux qui y avaient passé et qui lui revenaient en mémoire : les exigences du règlement, les mesquineries d’une vie réglée par autorité supérieure. Lui qui se soumettait impatiemment à l’autorité de son père, comment ferait-il pour ne pas se révolter contre celle d’inconnus ? Derrière le régiment, il voyait se profiler le conseil de guerre où l’on passe pour une vétille, pour un coup de colère, bien souvent justifié par les taquineries des supérieurs, pour une gifle appliquée à un gradé qui l’a cent fois méritée.

— Cinq ans ! pensait-il, aurai-je la force de les faire ? et si, par malechance, il fallait en attraper cinq autres, il me semble que je préférerais en finir tout de suite. Perdu pour perdu, je me vengerais de celui qui serait cause de ma perte.

D’un autre côté, son numéro l’envoyant dans l’infanterie de marine, lui qui n’était jamais sorti de Paris, où il était arrivé à l’âge de six ans, il se sentait chatouillé par l’idée de voir des pays dont il avait lu la description dans des relations de voyage.

Il savait qu’aux colonies on échappe — dans une certaine mesure — aux tatillonnements de la vie abrutissante de caserne. Voir de près cette flore des pays exotiques qu’il ne connaissait que par la gravure, ou par quelque rachitique échantillon va-