Page:Grave - La Société future.djvu/43

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Si les sociétés humaines ont évolué dans le sens de la concurrence individuelle poussée au dernier degré, si, au milieu de leurs associations les individus ont continué à se traiter en ennemis, cela est un fait, ce serait perdre son temps de s’attarder à le déplorer, mais en étudiant les causes de cette évolution on s’aperçoit vite, contrairement aux affirmations intéressées, que ce n’était pas une loi inéluctable, qu’il aurait pu en être autrement, et qu’en tous cas, il est plus profitable aux individus, et à l’espèce, qu’il en soit autrement dans le présent.

Cette étroite solidarité que nous voyons se pratiquer chez certains végétaux, chez certains animaux, chez des insectes tels que fourmis, abeilles, guêpes, etc., que l’on retrouve si développée dans certaines tribus primitives, pouvait prendre le dessus dans la lutte des instincts chez l’homme, donner une autre direction à son évolution, et tout autres auraient été les sociétés humaines. Il est donc absurde de venir dire que la « lutte pour l’existence » — entre individus — est une loi inéluctable.

L’homme en sortant de l’animalité nu et désarmé en face d’ennemis puissamment armés, a eu fort à faire pour protéger et assurer son existence. Il a dû avoir recours à la ruse, aux expédients que lui suggérait son cerveau, jusqu’à ce que cette intelligence fût devenue assez puissante pour suppléer à sa faiblesse native en lui permettant de fabriquer les armes défensives et offensives que la nature lui avait refusées.

Cette vie précaire, cette lutte incessante contre la nature et les autres espèces mieux armées, contre lesquelles il était forcé de disputer sa pâture et le