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LES PÊCHEURS DU LABRADOR

prendre que cette compagnie n’est pas respectable ; car, dans ces occasions, dès qu’ils aperçoivent leur maître, ils prennent un air de gravité tout à fait comique. Les deux familles s’allient quelquefois ensemble.

« Si les chiens esquimaux ne savent point aboyer, en revanche ils sont habiles à hurler : chaque soir, autour des maisons, ils donnent un concert au profit des dormeurs. Un vieux chien commence ordinairement à donner le ton, avec sa voix de basse-taille ; puis viennent les ténors ; et enfin les jeunes chiens se joignent con amore, aux anciens de la troupe, et un chœur de musique infernale continue ses lamentations jusqu’à une heure avancée de la nuit. Malheur au dormeur qui n’est pas encore accoutumé à ce vacarme ! Quant à ceux qui y sont habitués, ils n’en sont aucunement dérangés. Les hurlements sont répétés par les meutes des environs. Durant une nuit passée à bord de la goélette dans la baie de Bonne Espérance, autour de laquelle sont disposées quatre ou cinq habitations, nous fûmes régalés jusques après minuit, des hurlements d’autant de musiciens.

« Parfois la chanson est commencée par quelque chien exilé de la bande, et est continuée par les autres. À la Tabatière, chaque matin, en me rendant à la chapelle, vers cinq heures, je rencontrais, sur un morne écarté, un vieux solitaire de cette es-