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LES PÊCHEURS DU LABRADOR

Une terreur folle s’empare de leur esprit ; ils croient avoir affaire au diable, et s’imaginent que leurs jours sont comptés. Au bout de quinze à vingt minutes, un ronflement se fait entendre en avant d’eux, et ils aperçoivent en même temps une énorme baleine qui fuyait, entraînant la barge à sa remorque. Elle venait respirer à la surface de la mer en lançant deux colonnes d’eau. Ils parcoururent ainsi une distance de 25 à 30 milles. En vue des côtes de la Gaspésie, la baleine, changeant de direction, abandonna la barge, à la grande satisfaction des pêcheurs, qui avaient peu goûté cette course nocturne.

Ceci peut s’expliquer par le fait que la baleine, plongeant verticalement, avait suivi le câble, et s’était, sans le vouloir, probablement accroché le grappin dans un de ses ailerons, ou dans ses barbes, et ne put s’en dégager qu’au moment où elle prit une direction inverse.

L’espèce de baleine appelée cachalot attaque les chaloupes quand elle est blessée. Elle plongera dans l’eau et reparaîtra sous la chaloupe la gueule tout grande ouverte, une mâchoire de chaque côté de la chaloupe. Alors il faut faire un saut ; la baleine croquera la chaloupe, mais il est rare qu’elle s’en prenne aux hommes. On distingue facilement le cachalot par sa tête monstrueuse, tout à fait disproportionnée du reste du corps. Quelquefois il faut