sans défense, il avait l’air d’un navire en perdition destiné à disparaître dans la tempête. Il ne résistait qu’en se laissant aller à la dérive et aux coups de vent des factions déchaînées.
Lamartine seul gardait tout son sang-froid, son bon sens, bien plus admirable qu’on ne croit, et surtout le courage de ses opinions. Il avait à lutter à la fois contre le jacobinisme de Ledru-Rollin et le socialisme de Louis Blanc, sans compter les utopies ardentes de la multitude, et son héroïsme faisait face à tous les dangers, comme son éloquence répondait à tous les sophismes. Je ne l’ai pas vu le jour du « drapeau rouge ». Mais que de fois ne l’ai-je pas vu répondre aux différentes députations qui se succédaient à l’Hôtel de Ville presque sans interruption ! Arago, Marie, le vieux Dupont de l’Eure, Pagnerre même, prenaient bien la parole. Mais la foule demandait, exigeait Lamartine ; on eût dit qu’elle n’était venue vraiment que pour le voir et l’entendre. On allait donc le chercher. Il venait, calme, noble, la tête haute ; il demandait à ses collègues quelle était la question du moment et l’objet des réclamations populaires.
Le silence se faisait tout à coup dans la foule. Alors, tout de suite, presque sans se recueillir, il prenait la parole, et de sa belle voix sonore, avec le geste de l’autorité et de la conviction, il improvisait une réponse toujours admirable d’élévation