Page:Groslier - À l’ombre d’Angkor, 1916.djvu/159

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et me rejoignent irrégulièrement, sont pleines de ce qui me manque. Affection et gaîté entourent immédiatement ceux qui les écrivent. Et si par malheur, je les reçois, ces lettres, en des heures découragées, elles me sont douloureuses comme des blessures qui achèvent. Car dans mon campement où je lutte avec la fatigue, le doute et l’abattement, elles introduisent la nostalgie qui me parle des miens.

Si je puise à même aux poésies débordantes de la nature, aux beautés tropicales et si je trouve en elles un ensemble de joies rares et de nouvelles sensations, n’y a-t-il pas en France des équivalences que j’ai négligées peut-être, et pour lesquelles, tout au moins, j’étais mieux fait ?

Je préfère croire que non ; que la force certaine qui m’a ramené ici au cœur même de ce pays où je suis né et me pousse à étudier son passé, était une des forces obscures de la destinée ; et qu’il est logique dé payer ces satisfactions, des fatigues, des privations qu’elles entraînent, grâce auxquelles on les mérite, mais d’où résultent ces amertumes passagères qui en sont la rançon.

Je voudrais peindre et je n’en ai pas le temps. Ne suis-je pas envoyé ici et — quoi qu’on attende