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mes mémoires

J’avais dans mon idée, dit-elle, de demander à l’honorable Philippe Landry de remercier le conférencier et à Sir Wilfrid Laurier de le présenter[NdÉ 1]. J’allai parler de la chose à Lady Laurier qui me répondit : « Vous demandez l’impossible ; jamais vous ne pourriez avoir à une même réunion deux adversaires politiques de toujours comme Landry et Laurier. » Sur les entrefaites, arriva Laurier et je lui fis ma demande. Il accepta aussitôt, mais à une condition, qu’il ne fût pas question des écoles au cours de la conférence de l’abbé Groulx. Nous nous prêtâmes à cette condition. M. l’abbé Groulx traita d’un sujet historique, le sénateur Landry ne parla pas des écoles, mais le seul qui aborda la question scolaire, ce soir-là, ce fut précisément celui qui ne voulait pas qu’il s’en parlât, Sir Wilfrid Laurier. Et ce fut, d’ajouter Mme Marchand, grâce à ce petit abbé Groulx, que deux grands hommes, adversaires politiques acharnés, purent se parler et se rencontrer dans la suite.

Mes souvenirs sur Laurier

C’est beaucoup trop grandir mon rôle en cette rencontre des deux hommes. Et ceci m’amène à raconter mes souvenirs sur sir Wilfrid Laurier. Ces souvenirs remontent à mon enfance, au temps de la petite école à Vaudreuil — j’avais alors douze ans — lorsque, avec mes camarades, nous entreprîmes un jour de jouer aux élections, mais très sérieusement, avec appel nominal, force assemblées dans le village et suffrage universel des marmots entre dix et quinze ans. Quant à jouer, n’est-ce pas ? D’autant qu’en

  1. Ici le journaliste intervertit les rôles ; il attribue à Laurier le rôle proposé à Landry. Je corrige le journal d’après une note de Mme Marchand (note de l’auteur).