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troisième volume 1920-1928

étudiants s’est chargée de la partie musicale. Au nom de ses camarades, les étudiants de l’Action française, Jean Bruchési, e.e.d., présente le conférencier. Il le fait en termes non dénués d’humour :

Les étudiants sont des enfants terribles. Ils troublent la paix des assemblées politiques, détériorent les monuments de nos grands hommes, manquent de respect au « préfet des vigiles » et à ses subalternes ; mais, gardez votre sang-froid : ils fondent des cercles d’études, bien plus des cercles « d’Action française », et pour combler la mesure, ils organisent des conférences publiques où la paix n’est nullement troublée, où ne circule aucun gendarme municipal, et où, ce qui est superbe, la population intelligente est heureuse de venir puiser comme à une source de vie intellectuelle.

Asselin a partagé sa conférence en trois parties. Dans la première, il exécute assez durement les critiques de L’Appel de la Race : MM. du Roure, de Montigny, l’abbé Roy, Valdombre. M. du Roure, c’est le professeur de France, pour qui « l’essentiel à ses yeux n’est pas tant de conserver à trois millions de Canadiens le droit de parler le français, que d’enseigner la langue et la littérature françaises à une cinquantaine de jeunes gentlemen et de jeunes misses qui aimeront ensuite la France par-dessus nos têtes, avec un beau mépris pour les pea-soups d’Ontario ». M. de Montigny, c’est le monsieur d’Ottawa qui vit « dans un milieu où, à quelques honorables exceptions près, les gens instruits — ou censés l’être — sont français à la première génération, un peu moins français à la deuxième et pas du tout à la troisième ». Quant à l’abbé Camille Roy, « il est de la génération d’éducateurs québecquois qui naguère encore marquaient les fastes de l’Université Laval aux visites des princes du sang à la ferme de Saint-Joachim ». Valdombre, « ce garçon de génie — car il en a — s’“attrapera” lui-même un jour ou l’autre ». Le terrain ainsi déblayé, le conférencier prend la défense de L’Appel de la Race, en même temps qu’il en fait la critique. Il tient pour très vraisemblables les données du drame : conflit entre le devoir domestique et le devoir social. Non moins vraisemblables la conversion de Lantagnac, les thèses du Père Fabien. L’erreur capitale du roman, d’après le conférencier, serait la subordination de cette tragédie familiale au débat scolaire ontarien, c’est-à-dire à un