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troisième volume 1920-1928

immédiat ». Minville préfère le simple poste de conseiller technique du ministère. Il occupera, dans les années à venir, plusieurs emplois de même nature : organisateur de l’inventaire des ressources naturelles du Québec, organisateur et président de l’Office de recherche scientifique de la province. Emplois qui, pour les gouvernements d’illettrés qui vont se succéder à Québec, resteront plutôt des emplois de parade, des feintes, pour donner quelque satisfaction à certaines parties de l’opinion. Minville aura pu entreprendre néanmoins l’inventaire des ressources naturelles de la province. Pendant deux ans tout au plus, je crois, on lui verse les subsides requis. Puis, on laisse tomber l’entreprise. Incurie désolante, aux conséquences incalculables, quand on songe à l’équipe de travailleurs qui aurait pu se former sous un maître tel que Minville. Et nos facultés de sciences économiques et sociales, quelle avance, quelles aptitudes au travail pratique, elles auraient pu y prendre ! Et la province, grâce à cet inventaire ébauché il y a vingt ans, n’aurait peut-être pas eu besoin de s’en rapporter à des prospecteurs étrangers pour la découverte des immenses richesses minières de l’Ungava ! Commencée en Gaspésie, l’enquête n’en parcourt pas moins la rive sud du fleuve jusqu’aux environs de Québec. Elle rédigera des rapports. Qu’en fera-t-on ? Soigneusement enfouis en quelque tiroir de l’administration québecoise, ils y dorment encore. Minville m’a raconté un jour une de ses conversations, à Québec même, avec les députés de la région parcourue par ses enquêteurs. Tout éberlués des renseignements abondants et précis qu’il leur débitait sur leurs comtés, ces messieurs de lui dire :

— Mais où et comment avez-vous ramassé toutes ces notions ?

— Par une enquête que votre propre parlement nous a confiée et dont les rapports sont déposés dans les archives de l’un de vos ministères.

Je n’ai pas à raconter ici, en entier, la carrière de Minville. Directeur de l’École des Hautes Études commerciales de Montréal en 1938, auteur de livres précieux tels que Invitation à l’étude, Le Citoyen canadien-français, il aura été le principal dirigeant et animateur, chacun le sait aujourd’hui, de l’enquête Trem-