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listes » franco-américains ? Sans doute, a-t-il été manié et fort habilement par un politicien retors, Élie Vézina, secrétaire général de l’Union Saint-Jean-Baptiste d’Amérique. Et ce Vézina, dans sa guerre contre les « Sentinellistes », trouve à satisfaire, autant que sa foi religieuse, son aversion pour une compagnie d’assurance rivale, les Canado-Américains. Mais aussi bien l’occasion paraîtra trop bonne à Bourassa, qui ne sait plus sur quelles poitrines battre sa coulpe, de servir enfin aux siens, à tous les siens, une solennelle et décisive leçon. Au Devoir, parmi les principaux rédacteurs, on s’émeut. À tout prix, il faut empêcher la publication des fameux articles. On me fait mander au journal ; on veut mettre tout en œuvre, faire appel à toutes les influences possibles. On me prie, pour ma part, d’obtenir l’intervention de l’abbé Perrier, peut-être aussi de Mgr Courchesne ; d’autres verront le Père Joseph Lalande, s.j., directeur spirituel de Bourassa et qui a la confiance de son dirigé. En pleine sympathie avec les revendications des « Sentinellistes », je n’ai jamais pu, quant à moi, si juste que fût leur cause, approuver leurs méthodes de combat : ces assemblées de protestation publique contre l’évêque de Providence et le recours aux tribunaux civils. D’autre part, l’intervention de Bourassa surviendrait au moment le plus mal choisi. Excommuniés par Rome, Elphège Daignault et quelques-uns des principaux « Sentinellistes », conseillés par Mgr Courchesne et quelques prêtres éminents, négocient alors leur soumission. Les articles de Bourassa pèchent donc, à tout le moins, par inopportunité. C’est ce que lui représentent avec force l’abbé Perrier, Mgr Courchesne et, je crois aussi, le Père Lalan-