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mes mémoires

surtout ceux d’Ottawa — où il conduit la bataille avec une admirable endurance. De celui-là, il faut dire qu’il n’a pas varié. Tel je l’ai connu en sa jeunesse, tel je le retrouve aujourd’hui, l’esprit toujours aussi vigilant, aussi loyal à ses convictions qu’au temps jadis. L’on ne perd pas facilement le souvenir d’hommes à qui l’on pouvait tout demander, parce qu’ils avaient assez de cœur pour tout donner. En 1929, lors d’un congrès du Comité régional montréalais de l’ACJC, je rendais à Anatole Vanier cet hommage dont je ne retrancherais pas une seule ligne : « Il y a quelque chose de plus beau peut-être que la conférence qu’il vient de vous faire. C’est sa vie. Tout jeune, il fut des vôtres. L’heure venue de vous quitter, quand tant d’autres s’enferment ou s’enlisent dans le seul devoir professionnel, il se tourna vers la plus nécessaire de nos classes sociales, qui est aussi la plus négligée, et lui, avocat, il devint l’un des fondateurs du Comptoir coopératif, l’un des précurseurs, par conséquent, de l’Union catholique des cultivateurs de la Province de Québec. Entre-temps, il était déjà de l’Action française, y accomplissant gratuitement la besogne obscure et ingrate du secrétariat général ; ce qui ne l’empêchait pas, d’ailleurs, de se livrer à de personnelles initiatives. Et je crois bien, par exemple, que si l’un de ces jours, M. Anatole Vanier entreprend de publier sa correspondance avec la dynastie des ministres des postes, pour l’obtention du timbre bilingue, c’est une œuvre épistolaire en plusieurs tomes qui verra le jour. Aujourd’hui il vous revient, tel qu’il fut dans sa jeunesse, n’ayant rien abandonné en route. Et, devant une vie comme la sienne, j’ai compris que si l’on pouvait entretenir contre l’Association de la jeunesse, quelques griefs légitimes, des hommes comme celui-là la lavent de tout reproche décisif » (L’Action française, XX : 376-377).

Antonio Perrault

J’ai crayonné là la silhouette des pionniers. Parmi eux des vides allaient se produire. D’autres viendront combler ces vides. Et, parmi ceux-là, quelques-uns tiendront un tout premier rôle.

En tête, cette fois, je place celui qui, sans conteste, devint mon meilleur collaborateur, mon plus fidèle et mon plus solide