Aller au contenu

Page:Groulx - Mes mémoires tome II, 1971.djvu/325

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
317
quatrième volume 1920-1928

génération si profondément remuée par la parole brûlante d’Henri Bourassa. Dans son article pour le « Soixantenaire de la Confédération », Albert Lévesque, qui appartient à la génération de nos cadets, constate ce singulier état d’esprit :

Hélas, déjà des adultes commencent à s’alarmer de la médiocrité de notre génération. Personnalités indécises, talents rares, enthousiasmes mort-nés, volontés sans orientation, caractères sans consistance, ambitions d’arrivistes, esprits légers, bref, jeunesse blasée, opportuniste et indifférente, voilà le caractère particulier que la délicatesse de nos aînés ne s’est pas encore décidée à nous attribuer publiquement.

Et cependant, existe-t-il, dans notre histoire, génération aussi largement favorisée que la nôtre ?…

Que s’est-il passé ? Faut-il imputer ce désarroi inattendu à quelque déficience de l’esprit ou du talent ? Est-ce bien le lieu d’introduire un événement ou, pour parler plus juste, une éclatante défection, qui, dans les années prochaines, entrera, pour sa part, en la disparition même de L’Action française ? Je ne veux pas anticiper.

Fenêtres ouvertes

Pourquoi ce titre ? Parmi ceux qui évoquent parfois l’histoire de l’Action française, un trop grand nombre, j’en ai peur, n’y voient qu’une œuvre de nationalisme assez étroit. Point d’autre objet que le problème national, et encore bien enclos dans les seules frontières du Québec. On sait déjà la fausseté de pareille vue. Serait-il superflu d’y revenir ? Leurs fenêtres, il faut le dire en toute justice, pour la Ligue et sa revue, elles les ont tenues largement, généreusement ouvertes. Car enfin a-t-on jamais embrassé la vie du Canada français avec plus d’ampleur ? L’Action française a promené son éclairage sur tous les problèmes majeurs capitaux. Lesquels, à vrai dire, a-t-elle négligés ? Comment résumer, par exemple, l’aide constante, chaleureuse, qu’elle a fournie aux minorités françaises des provinces anglo-canadiennes ? Pas une de ces minorités qu’elle n’ait défendue, stimulée, dont elle n’ait proclamé à tous vents la résistance. Acadiens, Ca-