Page:Groulx - Mes mémoires tome III, 1972.djvu/243

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
232
mes mémoires

c’est l’évangile d’une « doctrine régénératrice ». « Les Canadiens français, leurs chefs en tête, écrit-il dans L’Action catholique (21 octobre 1935), ont complètement faussé l’orientation donnée à la Race par leurs pères… Une jeunesse débordante de vie, qui voit l’horizon borné tout autour d’elle, se révolte contre les postulats nationaux qui ont amené la déchéance collective de leurs compatriotes. Des chefs politiques qui ne sont pas des chefs nationaux, la jeunesse n’en veut plus. Une organisation économique dont le résultat fatal est l’asservissement de sa race, la jeunesse n’en veut plus. » Auparavant le journaliste avait lancé cette phrase : « La doctrine nationale de M. l’abbé Groulx est celle qu’il faut graver dans l’âme de toute notre génération. » Veut-on le sentiment d’un vrai jeune ? Raymond Douville, l’un de mes étudiants d’hier à l’Université, me décerne le rôle du prophète, pas moins, clamant sa doctrine devant la foule distraite ou hostile : « C’est pourquoi le dernier livre de l’abbé Groulx nous émeut et nous transporte… Un seul contre tout un peuple d’indifférents, qui lutte depuis tant d’années pour nous éveiller et nous trouve après chaque appel plus endormis encore, quel héroïsme et quelle ténacité ! » (Le Bien public, 31 octobre 1935). Un autre jeune, un Jeune-Canada celui-ci, Thuribe Belzile, souhaite, au nom de son groupe, qu’Orientations suscite « un mouvement judicieux et irrésistible de restauration nationale ». Enfin, mettons un point à ces litanies louangeuses par cette conclusion de Paul Beaulieu, dans La Relève, citée plus haut : « Ce livre est celui d’un maître. La jeunesse cherche un chef pour la conduire à de nouvelles conquêtes héroïques ; un maître s’impose et lui offre une doctrine précise, une mystique qui entraîne à la marche allègre et confiante vers l’accomplissement de notre mission catholique et française. »

En ces éloges où il faut faire la large part à un indulgent enthousiasme, une note me frappe et me plaît plus que toute autre, et c’est, en dépit de mes diagnostics souvent sévères, l’optimisme qu’on m’attribue et dont, en ma vie, je crois ne m’être jamais départi. « Groulx est trop français, le défaitisme ne mord pas dans son âme, écrira Paul Beaulieu, dans La Relève (nov. 1935). Il s’est donné une mission, et il continue en droite ligne, sans biaiser. » « Il ne cède ni au pessimisme ni à la désespéran-