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Notre Maître, Le Passé

été le facteur principal ; il n’a pas été indifférent, néanmoins, aux éléments surnaturels de la famille canadienne, qu’elle soit devenue, par la vertu de la coutume et par la volonté de notre vieux droit, ce type supérieur de société domestique appelé par les sociologues, « famille-souche ». Et, par « famille-souche », ils entendent, vous le savez, la famille où le foyer se perpétue par une succession ininterrompue d’héritiers de la même lignée, du même métier ou de la même profession, qui se transmettent avec le bien héréditaire, les coutumes, les méthodes de travail et surtout le dépôt sacré des traditions ancestrales. Frédéric le Play n’a-t-il pas écrit que la « famille-souche », plus encore que la constitution politique, a fait la grandeur de l’Angleterre ? Il a ajouté : « Le paysan propriétaire cultivant de ses propres mains un domaine transmis héréditairement, sous le régime de la famille-souche, a longtemps été en Angleterre et reste sur le continent, le type qui perpétue le mieux le règne du bien au sein d’une race. »

La famille-souche suppose, en premier lieu, le foyer domestique et le domaine comme atelier de travail. Et déjà c’est la vie et c’est le travail au grand air, loin, en tout cas, des centres de corruption, autant dire dans les conditions hygiéniques et morales les plus propres à entretenir la vigueur de la race.

Le domaine, parce qu’il est héréditaire, parce qu’il est le legs des ancêtres, n’est pas, comme le foyer du nomade, je veux dire le foyer du locataire, ou l’hôtel garni, une poussière indifférente, une possession éphémère, une habitation inanimée. C’est une chose vivante qui s’incorpore à la personnalité de la famille et à son histoire ; c’est une parente des anciens qui a pris à travers le temps