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PASSAGE DE L’HOMME

Dieu, on l’entendait marcher. Et les bêtes de là-bas sont bonnes et familières, les oiseaux vous tombent sur l’épaule et dans l’été ils vont parfois dans les maisons, oui, pour chanter, ou ils chantent sur l’appui des fenêtres. Les cerfs, qui, par ici, s’ensauvent, on peut les caresser de la main. Il est vrai qu’on ne les chasse pas et les hommes de ces pays-là n’ont jamais mangé de bêtes mortes, et c’est pourquoi, dit l’Homme, ils sont plus doux ».

Là-dessus, le Père parla un peu. Il dit : « Sûrement qu’ici on mange trop de viande et les hommes n’en sont pas meilleurs. On se fâche plus vite, et on a des envies de sang. Et ça fait les crimes et les guerres. Du temps des vieux, du cochon une fois par semaine, et c’était tout ; et c’était bien ».

Celui des Hauts avait tiré sa pipe, et il fumait, et il dit malignement à l’Homme : « Et dans les Iles, dites, est-ce qu’on fume ? et le tabac est-il meilleur ? »

L’Homme répondit : « Les Anciens fument. Oui, tous ceux qui ont barbe blanche, ils fument les soirs, quand c’est l’été, devant les portes des villages, et c’est un tabac odorant, tout plein de sagesse, un tabac blond, fin comme des cheveux, et les pipes sont des pipes de bruyère, mais d’une bruyère plus parfumée que celle-ci, et qui a comme l’odeur