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Page:Guèvremont - En pleine terre - paysanneries - trois contes, 1942.djvu/16

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Germaine Guèvremont

réconfortée, c’est plus beau de loin que de proche. J’ai pâti par là, pas de manger, mais pâti de compagnie, d’amitié.

— Tes maîtres étaient fiers ? questionne Amanda.

— Je peux pas dire qu’ils étaient fiers. Non, je peux pas dire ça.

Et deux fois encore elle proteste avant de continuer :

— C’est du bon monde à leur manière, mais ils ne mènent pas la même vie que nous autres. Je vais vous en donner un exemple : ils se réunissent l’après-midi tout bonnement pour boire une sorte de boisson qu’ils appellent un cocktail, mais qui est ni plus ni moins que le petit caribou de par chez nous.

— Ah ! cré bateau, ça vit en grand ! observe le père Beauchemin vivement intéressé, lui qui ne dédaigne pas un coup de fort.

— Vous dire toute la toilette qu’ils portent, poursuit Alphonsine, c’est pas disable. J’ai vu un manteau de vrai vison ; je l’ai même tenu dans mes mains. Apparence qu’avec le prix de ce vêtement-là, une famille de par ici peut s’acheter une terre.

— Une terre ! C’est presquement pas chré-