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Page:Guèvremont - En pleine terre - paysanneries - trois contes, 1942.djvu/20

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Germaine Guèvremont

tant au soleil. Un volier d’outardes passaient sûrement au-dessus de la maison ; quoi qu’on ne pût les voir, leur cri était distinct.

Marie-Amanda, cependant, n’écoutait qu’un bruit : un grondement lointain vers lequel elle tendait tout son être : oui, c’était la glace qui grugeait. À ces signes multiples, elle reconnut les premiers gestes d’un printemps hâtif.

Ainsi le miracle de la délivrance allait s’accomplir de nouveau. La jeune paysanne songeait, avec un émoi indicible, au réveil de toute la nature : à l’eau courante parmi les joncs, à la sève abondante dans les arbres, aux bourgeons crevés en émeraudes, au bleu des mignonnettes, aux fraises rougissantes auprès du sable blond, elle songeait à la verte campagne, à l’odeur du terreau sous la pluie, aux cantiques des premières communiantes, aux oiseaux dans les nids, et la joie débordait de son cœur tandis qu’elle proclamait à toute voix :

— La glace marche ! Le printemps arrive !

***