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Page:Guèvremont - En pleine terre - paysanneries - trois contes, 1942.djvu/24

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Germaine Guèvremont

sur le perron, Didace Beauchemin arrête le mouvement de sa chaise berçante :

— Qui est là ?

Bien sûr, c’est Ludger Aubuchon. À le voir misérable et gêné, adossé au chambranle de la porte, Amanda a deviné le but de sa visite. Moitié pour lui venir en aide, moitié pour alléger son cœur au plus tôt, elle s’arrache de la bouche la question qui la tracasse tant :

— Comme ça t’es décidé à partir ?

— Je vas te dire, Amanda, ils sont venus d’en bas pour « rapailler » du monde. Et les bonnes gages se refusent pas par les temps qui courent.

Après un long moment d’hésitation, Amanda reprend :

— Et quand c’est que t’as l’idée de t’en aller ?

— Pour parler franchement, Amanda, ça peut pas retarder. Le radoub des bateaux est achevé depuis longtemps et la pose des bouées commence demain matin. Mon paqueton est là sur le perron.

En tiraillant les mots, elle parvient encore à demander :

— Par où que tu vas naviguer ?