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Page:Guèvremont - En pleine terre - paysanneries - trois contes, 1942.djvu/36

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Germaine Guèvremont

aller en Cour. Pour deux pailles en croix, il aurait plaidé jusqu’à amen. En moi-même je me demandais parfois si le cœur de cet homme-là n’était pas semblable à une sorte de terre qu’on vient jamais à bout d’érocher en entier. Il s’est bien amendé avec les années, mais il lui reste encore du chemin avant d’arriver au terme de la perfection. On le sait bien, le meilleur des hommes… Ça n’avancerait rien de parler contre : mieux vaut les accepter tels qu’ils sont.

Je n’ai jamais connu, comme les autres femmes, le bienfait d’être reine et maîtresse dans la maison. Dès notre mariage, on est venu habiter chez ses parents à lui. Plus tard quand les vieux se sont donnés à nous, on a confondu les biens et on a encore demeuré tous ensemble. À l’heure que sa vieille grand’mère est sur le point de trépasser et que je commencerais à régner, Amable parle de se marier et d’emmener une étrangère. Je ne devrais pas dire : une étrangère. Alphonsine Ladouceur entrera chez nous comme la fille de la maison, mais c’est quand même tout un apprentissage à faire. Elle a goûté à la vie de la ville. Qui nous dit qu’un