Aller au contenu

Page:Guèvremont - En pleine terre - paysanneries - trois contes, 1942.djvu/57

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
59
En Pleine Terre

buste, Amable avait piqué de sa fourchette quatre tranches de pain de ménage et n’avait pas encore entamé l’omelette au lard. Les femmes s’affairaient à servir les hommes, aussi bien l’engagé que les maîtres qui s’entretenaient sans paroles inutiles de ce qui les occupait.

Bien qu’elle ne fît part à qui que ce soit de son inquiétude, la mère Beauchemin n’était pas à l’aise. Un frisson la parcourait de la tête aux pieds et elle sentait que, malgré la grande chaleur, elle avait la chair de poule. À peine eut-elle mangé une lèche de pain qu’elle repoussa son assiette et s’en fut s’asseoir sur le seuil de la porte pour guetter les alentours. Éphrem n’arrivait pas. Il connaissait pourtant la sévérité de son père qui n’admettait pas un retard à table. Et dans son cœur, elle inventait déjà mille raisons pour le faire pardonner.

À la fin du repas, chacun dit ses grâces en particulier ; ils se levèrent de table, à leur gré, sans plus de cérémonies. Le grand Didace Beauchemin et Amable ayant fumé leur pipe s’étendirent sur l’herbe, le temps de refaire des forces, avant de regagner le haut de la terre. Alphonsine et Marie-