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Page:Guèvremont - En pleine terre - paysanneries - trois contes, 1942.djvu/73

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En Pleine Terre

main. Et on était encore éloignés du premier de septembre. Une bonne fois, je me décide à dégraisser mon fusil. Mes vieux ! ça tombait comme des mouches : des pluviers dorés, de la sarcelle, des français, des noirs, des cous rouges, des becs bleus, tout ce qu’il y a de mieux.

« En arrivant à la maison, avant de cogner un somme, je dis à ma vieille : Y a pas d’soin, tu peux t’en faire cuire si ça te tente. Pas un vivant va venir sentir par icitte aujourd’hui. Y faut vous dire qu’y faisait un air de vent et que l’eau tombait par paquets. Trois gouttes au siau.

« Je choisis les deux plus beaux noirs. Et aussitôt la femme se met à les plumer. Avec ça qu’elle savait le tour de se laisser traîner le pouce dans le duvet. Mais la v’la qui commence à se tourmenter pour savoir si elle devait les faire cuire à la daube ou en ragoût. Quant à moé, ça me faisait ni chaud, ni fret, parce que je mange rien de ce qui porte plume. Ça m’est contraire sous tous rapports.

« Vers midi, ça toque à la porte. À moitié endormi, j’vas répondre sans méfiance. Qui c’est qu’il y avait là ?