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LE SURVENANT

Distrait et nerveux, Venant répondit dans le vague. À tout moment il palpait les billets de banque dans sa poche et son regard consultait l’horloge. Au bout d’un quart d’heure, comme Angélina tirait son sac à ouvrage, il dit en se levant :

— Sors pas ton tricotage, la Noire. Je peux pas veiller tard à soir.

Sans plus d’explication, il partit. Mais, arrivé au chemin, au lieu de se diriger vers la maison des Beauchemin, d’un pas alerte il prit la route de Sorel.

* * *

Le lendemain l’eau monta sur la glace et Venant voulut chasser le rat musqué tout de suite, sans tendre des pièges, sans amener Z’Yeux-ronds et sans prendre conseil de personne. Il prépara le petit bac tôlé, y installa le fusil, plus deux ou trois canards domestiques, dans une poche, pour chasser en maraude le canard sauvage et il partit, tantôt à pied sur la glace, tantôt dans l’embarcation. La nuit froide avait fait se former un peu partout une glace mince, même au fond du bac que Venant, inexpérimenté, avait négligé de garnir d’un tapon de paille. Il y glissa et tomba par-dessus bord dans un trou où par bonheur l’eau était peu profonde.

En se relevant il vit des canards voler dans la