Page:Guèvremont - Tu seras journaliste, feuilleton paru dans Paysana, 1939-1940.djvu/4

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plume impartiale, rendaient des jugements sans appel.

Pendant des mois, elle se sentit porter par une force secrète ; elle vaincrait tous les obstacles pour puiser dans l’eau vive, à la source de l’inspiration, des vocables et une histoire qui enchanteraient l’univers. Déjà des mots doux miraient dans son idée… fraîcheur, cil, les plus doux de tous.

Mais la réalité, rogneuse d’ailes, lui eut tôt fait savoir que moins rares que les dieux sont les hommes de chair qui exhortent les belles filles à autre chose qu’à la littérature et qu’à la cime des chênes comme au plan des roseaux, il n’y a que vanité.

Et aujourd’hui… par un temps mort, en juillet…

Maintenant, seule, sans situation, perdue dans une chambre de pension misérable, qu’elle était loin de son village aux contours familiers, aux odeurs nettes, où personne ne l’accueillerait plus ! Elle connaissait trop l’unique parente qui lui restait pour espérer d’elle quoi que ce soit de bienveillant, une vieille tante âpre aux questions d’argent, intransigeante et le reproche sans cesse à la bouche.