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Page:Guèvremont - Tu seras journaliste, feuilleton paru dans Paysana, 1939-1940.djvu/6

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ses proprement. Le verdict serait : mort accidentelle. Elle le voulait ainsi.

Non pas qu’elle laissât quelqu’un qui lui tenait au cœur, mais le respect du nom honnête qu’elle portait l’incitait à le préserver de tout bruit malsain.

Tantôt la pension serait vide. Toutes fenêtres closes, elle déposerait sur le réchaud à gaz de sa chambre une bouilloire d’eau renversante et le courant établi sans feu, le sommeil éternel succéderait vite au sommeil temporel. Son sens d’humour la fit sourire à l’idée du compte de gaz qu’elle n’acquitterait pas : « Ce sera bien la seule fois que j’aurai eu raison d’une grosse compagnie », se dit-elle. Mais c’était là simple boutade. Elle vérifia le contenu de son sac : de la monnaie et quelques dollars solderaient amplement ses dettes. Quant aux frais de son enterrement, une petite assurance y pourvoirait. Pas une ligne, pas un mot écrit ne signeraient son arrêt de mort volontaire.

Avant de paraître devant Dieu, elle entreprit de s’expliquer avec son Créateur :

« Vous, mon Dieu, qui m’avez créée et mise au monde, essayez de me comprendre et de démêler l’écheveau de mes mouvements, je n’en ai plus la force. Vous