Page:Guèvremont - Tu seras journaliste, feuilleton paru dans Paysana, 1939-1940.djvu/7

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m’avez fait don d’une sensibilité qui m’a causé bien des déboires. Je suis loin de Vous en faire des reproches, car elle ne m’a pas apporté que des déboires, elle m’a aussi comblée de joies. »

« Tout m’était blessure ou tout m’était jouissance. Jamais un juste équilibre n’a su me maintenir au niveau des autres. Si une fierté sans pareille n’était venue mettre son comble à mon cerveau, peut-être y aurait-il eu pour moi des accommodements avec la vie. J’aurais extériorisé, j’aurais crié et ce cri même m’aurait rassurée. Au lieu de cela, le silence, toujours le silence, rien que le silence. La solitude du cœur, la pire des indigences ! À qui la faute, mon Dieu ? À Vous qui ne m’avez pas voulue autrement ou à moi qui n’ai pas su me parfaire. »

« Dès mon jeune âge, quand je reçus cette poupée féerique, mille fois plus belle que celle que j’espérais, je n’ai pas eu un mot pour dire mon émerveillement et m’enfuis, dans un coin, impuissante à rendre mon émoi. Je savais alors que jamais, je ne serais comme les autres et déjà j’en étais infiniment malheureuse. »

« Et pourtant, y a-t-il une femme sur