Page:Guèvremont - Tu seras journaliste, feuilleton paru dans Paysana, 1939-1940.djvu/77

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par hiérarchie de province : après les parents, les hommes de profession alias les professionnels avec leurs épouses en grand tra-la-la, corpulentes pour la plupart et satisfaites de leur glorieuse quarantaine ; ensuite les privilégiés de la fortune et enfin les autres : les nuls, les méritoires et les talentueux.

Jamais le temple de Troudeville ne vit et ne verra réunies autant de parures de martre, chaque dame comparant d’un œil en-dessous la valeur de la sienne avec celle de ses voisines.

Voici le marié portant beau. Sous un cran de bon aloi, il cache son émotion et sa détresse pécuniaire. Il est jeune et il a, comme dans les livres de la Bibliothèque de ma Fille, une tante qui est riche et qui n’est plus jeune. Un regard à la dérobée, rapide et circulaire, lui montre la tante solide sur ses vieux jarrets. Il baisse la tête… de bonheur pensent les assistants.

Dans la grande allée garnie de cent têtes qui s’agitent, la mariée paraît, pas sous le dais, mais charmante à souhait avec son teint de bouton de rose voilant sous un air de modestie, son bonheur, et sous d’innombrables petits volants, les non moins innombrables défauts de sa robe.

Chacun emmagasine le moindre détail dans un coin sûr de sa mémoire